mai 2019

Si les ordonnances de 2017 ont réduit le rôle des suppléants élus du CSE en ne leur permettant plus – sauf accord- d’être systématiquement présents aux réunions plénières de cette nouvelle instance, il n’en demeure pas moins que ce rôle n’est pas réduit à néant et il nous est apparu utile de synthétiser quelques principes de base :

En premier lieu –et il est important de le faire savoir afin de trouver des candidats motivés en vue des élections-, le suppléant est membre à part entière de la délégation du personnel au CSE et, même s’il ne dispose pas – en tant que tel- d’heures de délégation (voir ci-dessous) :

  • il doit disposer – au même niveau que le titulaire au CSE – d’un accès à une base de données économiques et sociales (BDES) conforme et complète et, notamment, aux procès-verbaux de l’instance, à toutes les informations que doit l’employeur, au Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels, à tous les bilans (dont celui sur la situation générale de la sécurité et des conditions de travail et des actions menées au cours de l’année écoulée dans ces domaines ainsi le programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail)

 

  • il peut (dans les entreprises de 50 salariés et plus)– puisqu’il s’agit de temps non décomptés sur les heures de délégation et considéré comme du travail effectif :
    • procéder aux inspections périodiques décidées par le CSE en matière de santé, sécurité et conditions de travail
    • accompagner l’agent de contrôle de l’Inspection du Travail (l’employeur a l’obligation de prévenir les membres du CSE) et peut lui présenter ses observations
    • participer aux inspections communes lorsque l’entreprise fait appel (y compris dans ses dépendances et chantiers) à une entreprise extérieure qui fait intervenir des travailleurs pour exécuter ou participer à l’exécution d’une opération, quelle que soit sa nature
    • procéder à des enquêtes en cas d’accidents de travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel, à la suite d’incidents répétés ayant révélé un risque grave

 

  • il dispose d’un droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement (L4133-1 et suivants) – en sus du droit individuel de retrait (L 4131-1) via notamment l’inscription au registre prévu à D 4133-1 et suivants.

 

  • Il revient au CSE via son règlement intérieur, à défaut de dispositions d’un accord d’entreprise sur le fonctionnement du CSE (soit lors de l’accord pré-électoral, soit dans un accord spécifique à tout moment du mandat du CSE) prévoyant un système plus favorable comme l’octroi d’heures de délégation spécifique aux suppléants, de convenir de la « cession » d’heures de délégation de titulaires aux suppléants afin de leur permettre de participer aux réunions préparatoires.

 

A cet égard, il faut rappeler que les modifications du volume individuel d’heures de délégation ne peut se faire, selon nous, que par voie d’accord (un règlement intérieur de CSE ne pouvant imposer des contraintes non prévues par la Loi) et sous condition de respecter deux principes : respect du minimum d’heures mensuelles de délégation (10 heures pour CSE de moins de 50 personnes, 16 heures au-delà) et respect du volume global d’heures de délégation des titulaires par collège.

 

Il en est autrement en ce qui concerne le principe du report et de la mutualisation d’heures de délégation. Il n’est pas nécessaire de le formaliser mais nous recommandons de le traduire dans le règlement intérieur du CSE.

 

Suivant L 2315-8 et 9, les heures des  titulaires non utilisées sur un mois peuvent être reportées sur le mois ou les mois suivants dans la limite de 12 mois. A condition que chaque élu ne dispose pas par le jeu du report– in fine- de plus de 1,5 fois le montant mensuel d’heure de délégation prévu réglementairement et que d’autre part, le salarié informe son employeur au moins 8 jours à l’avance de la date prévue pour l’utilisation des heures reportées.

 

Il nous parait donc nécessaire que les équipes de CSE gèrent (au global ou par organisation syndicale) le volume global d’heures de délégation de telle sorte que les suppléants puissent disposer de temps commun avec les titulaires ou prendre en charge une partie des temps nécessaires à la vie des ASC.

 

De même, nous recommandons (en le formalisant par le règlement intérieur) les modalités internes de communication entre membres du CSE afin que les suppléants se sentent intégrés à l’équipe et puissent émettre leurs opinions.

 

Les titulaires peuvent – en effet – chaque mois, répartir entre eux et avec les suppléants les crédits d’heures (ne serait-ce que ceux à leur disposition alors qu’ils peuvent être absents pour des congés prévus). Le règlement intérieur du CSE devrait permettre de déterminer le formalisme (identité du titulaire, du suppléant, nombre d’heures mutualisé mensuel) nécessaire.

 

  • Il dispose par mandat de 4 ans – au même titre que le titulaire- du droit à la formation en matière de santé, sécurité, conditions de travail (pour rappel de 3 jours pour les entreprises de moins de 300 personnes et 5 jours au-delà , sauf accord plus favorable), de son choix, pris en charge financièrement intégralement par l’employeur.

 

  • Il doit être obligatoirement convoqué à toutes les réunions du CSE (et recevoir l’ordre du jour ainsi que les documents attachés éventuellement). La jurisprudence (Cass Crim 28 avril 1977, N°76-90762) indique qu’il incombe à l’employeur de prévoir que les salariés convoqués quitteront leur travail pour se rendre à la convocation et de prendre les mesures appropriées pour que le service ne soit pas perturbé.  Ceci même si le suppléant n’assiste pas à la réunion car il doit être prévu qu’un suppléant puisse, à tout moment, remplacer un titulaire (absence momentanée quelles qu’en soient les causes et la durée). Un obstacle au remplacement entache d’irrégularité les décisions (les avis en cas d’information et consultation par exemple) du Comité (C .Appel Dijon du 20 décembre 1974, Société Duchange contre Nicolini). Il est recommandé qu’un membre du CSE demande spécifiquement lors de la réunion que le suppléant censé remplacer un titulaire doit participer au vote. Il y a donc là une réelle difficulté à laquelle vont être confrontées les Directions si elles ne mettent pas en place un système d’information adéquat notamment lors d’absences connues (par elles) d’un titulaire. Il faudra aussi se munir des règles très précises de remplacement (suivant L 2314-37 du code du travail) et les respecter faute de quoi les décisions demandant un avis pourront être contestées.

A la lumière de dizaines d’accords publiés depuis plus de 12 mois mettant en  place les CSE , très rares sont ceux prévoyant la présence des suppléants aux réunions plénières des CSE ( par exemple l’accord TOTAL de juillet 2018 permet leur présence à deux réunions par an « afin de se familiariser au fonctionnement de l’instance » ou sont présents « afin de prendre en compte les connaissances de certains suppléants sur des sujets précis de l’ordre du jour » dans l’accord NAVAL GROUP de juillet 2018. En revanche, plus nombreux sont les accords (par exemple TERRENA, AFP, France TELEVISION, NORAUTO, MAIF, AXA, TOTAL) prévoyant que des membres des Commissions SSCT peuvent être des suppléants des CSE et disposer ainsi de crédits d’heures spécifiques.

Il faut aussi remarquer les dispositions de l’accord MANPOWER (27 novembre 2018) qui créent des « suppléants siégeants » habilités à participer à toutes les réunions des CSE, choisis suivant des règles, précises parmi les suppléants. Les trésoriers et secrétaires adjoints des CSE peuvent être des suppléants.

Il faut noter également dans cet accord que l’ordre du jour est envoyé par courriel aux titulaires et suppléants en leur demandant de confirmer leur présence (pour le titulaire et le suppléant siégeant) et pour les autres suppléants de confirmer leur disponibilité. Il est aussi demandé à tous les titulaires de prévenir le Président du CSE de toute absence programmée dans les 48 heures de la réception de la convocation. Dans le même ordre d’idée, il est demandé à chaque membre titulaire absent d’avertir préalablement par écrit le secrétaire du CSE et la RH en indiquant si le suppléant sera présent (accord AIRBUS d’octobre 2018).