Cette évidence doit être partagée non seulement en ce qui concerne la prévention des risques professionnels (notamment les risques psychosociaux) pour cette catégorie de futurs responsables mais aussi pour amener ces futurs chefs de projet/ responsables d’équipes à intégrer dans leur démarche professionnelle, dès la conception des projets dont ils auront la charge, une appréhension critique des différences entre travail prescrit- travail réel et travail ressenti.

Une illustration en parcourant l’article de Alice Raybaud  dans le journal LE MONDE du 22/11/2019  intitulé « les écoles de commerce timidement investies dans la prévention du « management toxique »

« Stress, burn-out, harcèlement, violence… Autant de problématiques rarement abordées en formation initiale dans les écoles de management. Certaines commencent à se positionner sur ces sujets.

 

Avec la numérisation de l’économie, les conditions de vie au travail n’ont cessé de muter au cours des dernières décennies, favorisant la croissance du mal-être au travail. De multiples enquêtes le prouvent. En 2017, 24 % des 30 000 salariés interrogés par le cabinet Stimulus présentaient un état d’« hyper-stress » et 52 % un « niveau élevé d’anxiété ». Avec des conséquences loin d’être anodines : dépression, troubles musculosquelettiques, maladies cardio-vasculaires…

« La prévention des risques psychosociaux devrait être au cœur de la stratégie des écoles de management, mais c’est loin d’être le cas, déplore Marc Bonnet, professeur de management à l’IAE Lyon, auteur d’une étude sur la responsabilité des écoles de management pour améliorer la santé au travail. On y enseigne encore des méthodes de management pensées au début du XXe siècle et qui ne sont plus adaptées à la réalité de l’entreprise, sans donner aux étudiants les outils pertinents. »

 

Or, le manageur apparaît comme un relais indispensable dans l’entreprise pour la prévention des risques psychosociaux. Si ceux-ci peuvent être entraînés par une surcharge de travail, ils sont aussi liés à la question du sens que le salarié attribue à son rôle, à celle de la reconnaissance dont il bénéficie et à la manière dont il est dirigé. Autant de dimensions sur lesquelles le management influe fortement.

« En termes de risques psychosociaux, notre pays est le mauvais élève européen », affirme Patrick Légeron, psychiatre, fondateur du cabinet Stimulus et coauteur en 2008 d’un rapport sur ce sujet pour le ministère du travail. « Alors que dès les années 1970 les pays du nord de l’Europe formulaient leurs premiers accords d’entreprise sur ces questions, en France, il a fallu attendre l’accord national interprofessionnel sur le stress au travail de 2008, indique le psychiatre. Le manque de formation sur ces sujets avait été pointé du doigt. Mais plus de dix ans plus tard, on est encore loin du compte. » Selon lui, les drames survenus à France Télécom – dont le procès des dirigeants s’est ouvert en mai 2019 – sont symptomatiques d’un certain « management toxique ». « Ce fut un électrochoc à l’époque. On a commencé à se rendre compte du prix humain d’années de mauvais management… »

Cette prise de conscience a-t-elle fait évoluer les cursus dans les grandes écoles ? Des modules ou des cours optionnels commencent à apparaître, mais ils restent peu nombreux et concernent rarement tous les étudiants, d’après notre enquête.

A l’ESCP, en plus d’un module optionnel, la prévention des risques psychosociaux est incluse dans le cours de gestion des ressources humaines, obligatoire en première année de master. « Cette sensibilisation ne s’étend que sur deux heures, mais elle est cruciale pour leur faire comprendre ce que sont ces risques, ainsi que les milliards d’euros que coûtent ceux-ci en termes d’absentéisme, d’arrêts de travail », explique l’enseignante Géraldine Galindo.

Pour Marc Bonnet, de l’IAE de Lyon, c’est ce dernier levier qu’il s’agit d’activer. « Il faut que les étudiants et les entreprises prennent conscience qu’améliorer la vie au travail est non seulement socialement souhaitable, mais aussi très rentable. » Mais, pour porter un management sain, encore faut-il avoir des outils pour y parvenir. La seule sensibilisation ne suffit pas : connaissances en psychologie et clés de communication sont les maîtres mots en la matière et apparaissent de plus en plus dans les cursus »